La crise de Cuba
Au large de la Floride, l’île de Cuba est un territoire stratégique pour les Américains. Son passage dans l’aire d’influence soviétique inquiète donc Washington, d’autant plus qu’il remet en cause la domination américaine en Amérique latine, indiscutée depuis la doctrine Monroe de 1828. En quoi cette crise constitue-t-elle une crise sans précédent ?
Khrouchtchev décide, au printemps 1962, d’installer à Cuba des missiles nucléaires. L’installation de missiles soviétiques à Cuba représente une menace pour les États-Unis en raison de la proximité entre l’île et le continent. En effet, les missiles pourraient menacer et toucher tout le sud-est des États-Unis, jusqu’à la capitale Washington. La démonstration de force soviétique serait aussi une menace pour l’influence que les États-Unis entretiennent dans tout le continent américain depuis le XIXe siècle. Kennedy décide de faire un embargo contre Cuba, c’est-à-dire de bloquer la circulation des navires soviétiques qui acheminent des armes vers Cuba. Il décide aussi de saisir en urgence le Conseil de sécurité de l’ONU. De plus, le président américain menace l’URSS de représailles massives, c’est-à-dire de riposter par une attaque nucléaire.
Face à l’embargo américain, l’URSS préfère reculer pour éviter l’escalade et le risque de guerre nucléaire. Khrouchtchev redoute deux choses : l’invasion de Cuba par les États-Unis et la perte d’un allié stratégique en Amérique centrale et une guerre nucléaire entre les deux superpuissances de la guerre froide. C’est pourquoi il interprète l’issue de la crise comme une victoire soviétique et justifie sa décision, puisqu’il dit avoir obtenu satisfaction sur le premier point (garantie américaine de ne pas envahir Cuba) sans avoir eu besoin de déclencher le second (guerre nucléaire). Castro aurait voulu aller jusqu’au bout et tenir tête aux États-Unis, ce qu’il ne peut faire sans le soutien soviétique. Le recul de Moscou déçoit donc le dirigeant cubain. Une célèbre caricature de Illingworth oppose Kennedy et Khrouchtchev qui se livrent à une partie de bras de fer, tout en menaçant d’actionner le bouton qui déclenchera la mise à feu des fusées à ogive nucléaire sur lesquels ils sont assis. Le caricaturiste rend bien compte du rapport de force lors de la crise de Cuba, qui consiste pour chacun à tester l’adversaire, y compris en utilisant la pression psychologique.
La crise de Cuba est traditionnellement considérée comme le point culminant de la menace nucléaire durant la guerre froide, parce qu’elle a mené « le monde au bord du gouffre » (Kennedy).
Date de dernière mise à jour : 30/05/2022